jeudi 8 octobre 2009

"J'aurai raconté des histoires avec des filles, personne n'aurait rien remarqué" (Frédéric Mitterrand, 2005)

Evidemment j'ai du mal à tenir en place après la prestation de Frédéric Mitterrand et de Laurence Ferrrari sur TF1. A l'école de journalisme, on m'avait bien appris que la seule bonne réponse dans une interview c'était oui ou non, j'avais trouvé ça dramatique ou un peu court.

Pourquoi avoir cherché à expliquer à 20 heures, sur TF1, avec Laurence Ferrari, ce qu'Aragon appelait le "mentir-vrai", et qui définit toute oeuvre d'écriture, alors que Marine Le Pen sait parfaitement nager dans la boue ? D'autant plus difficile que le livre a eu du succès, qu'il avait été à peu près compris à l'époque, et qu'il le présentait comme autobiographique.

J'avais lu dans l'après midi le passage du livre mis en question par Marine Le Pen, émouvant, au souffle court, cherchant le vrai, dénonçant le sordide de la condition et très respectueux de tout humain.

Mon petit côté moraliste chrétien socialdémocrate libertaire avait quand même ramené à la surface le mépris que j'ai pour la souffrance des folles honteuses que le poids des fausses bienséances pousse à la comédie ici, à des actes sordides ailleurs, alors que sur la moindre plage en France on peut nouer des relations tout à fait satisfaisantes (et de grandes passions) si l'on ne se déteste pas trop soi-même.

Mais il était clair qu'il n'y avait que la peinture d'une déchéance bourgeoise et d'un avilissement de soi, raconté pour essayer d'en sortir. Ni pédophilie, ni apologie de la prostitution, encore moins du tourisme sexuel. Juste une naïveté d'ado bourgeois tellement engoncé de préjugé qu'il tombe amoureux de la prostituée qui le dépucèle.

Frédéric Mitterrand a été lumineux, autocritique, recherchant le vrai.

Il a condamné la pédophilie, le tourisme sexuel. Avoué ses perditions souffrantes.

Le public retiendra certainement le contraire.

Et on ne peut en retenir que la confirmation d'une série de brouillards d'amalgames qu'il essayait de démonter. Quand on ne tue pas un cliché, on le laisse partir en volutes avec ses suites : le journalisme est avant tout une simplification.

Bref je ne vois pas comment 70 % de la population aurait pu un instant comprendre ce qu'il disait.

Pire, cela conforte l'idée de plus en plus tenace qu'un politique devrait être au dessus de tout, et n'est pas un citoyen comme un autre. Autrefois, c'était l'Eglise qui se mettait dans cette position, on sait ce que ça a donné.

Et la dernière fois qu'on a essayé de le mettre en pratique, c'était en Allemagne dans les années 30, dans certaines dictatures communistes et dans l'Espagne de Franco.

Au fait, qu'est ce qu'il chantait Tino Rossi ? "Tu n'as que seize ans, mais faut voir comme tu affoles déjà tous les hommes... la rondeur de ta poitrine qui les rend fous".