jeudi 30 octobre 2008

Une dernière fois, boire des coups et discuter à côté de Victor

Voilà, Victor ne rigolera plus, ne souffrira plus (en silence) et a particulièrement bien rempli sa vie.
Et samedi soir, il avait arraché ses cathéters parce qu'il était urgent d'aller boire une bière.
Et nous on a bu des coups dans la nuit à côté de son cercueil, tout le monde n'a pas supporté cette idée et je ne le réalise vraiment qu'aujourd'hui.
En fait, cette idée n'était pas philosophique, c'est juste qu'à force d'être plusieurs à venir de certains villages de certaines montagnes de certaines îles, on a des réflexes : veiller les morts et se tenir compagnie, faire bien attention à en donner tout ce qu'on peut de trop à la famille, veiller ... à l'occuper tout le temps et lui donner des preuves de tout, encore, encore, encore. Comme on était pas en Corse, on n'avait pas autour de nous quinze familles organisées pour passer toutes les cinq minutes jusqu'au petit matin, mais c'était presque comme ça, autant que c'était possible ici en tous cas.
En fait, on a bu (un) coup, parlé parlé parlé et on est restés avec lui juste pour nous.
Et c'était certainement pour ça qu'il a été celui qu'il fallait.

lundi 27 octobre 2008

Le monde est petit et le ciel est grand


D'ailleurs, les canapés mexicains (dessinés par des italiens, on ne voit pas d'ailleurs qui d'autre) bénéficient d'une aide pour y monter. Ca prend quelques efforts, tout à fait terrestres, et quand le Claudito change d'océan, le ciel et la terre font autant d'efforts que lui pour qu'il soit joliment assis devant une représentation réelle de l'infini. Normal, pour un penthouse dans une ville qui s'appelle "je vois une montagne". Au fait, en dehors d'Elli Medeiros, il y a Lautréamont, aussi, qui est né à Montevideo (et Laforgue, encore), et le niçois Garibaldi s'est plus battu en Uruguay qu'il ne l'a fait pour obtenir l'unité italienne (et il l'a obtenue, pour mourir en regardant la Corse de sa fenêtre).
Claudito, tu ne sais pas habiter dans des endroits neutres.

dimanche 26 octobre 2008

Admiration



Et en plus il est courageux, parle français et croit aux sentiments, j'hallucine.

samedi 25 octobre 2008

Out and quiet, c'est un progrès par rapport à Out and proud




Décidément Matthew Mitcham est un bonheur personnifié (son attitude est très cohérente, d'ailleurs, avec ce qui resort de "Nés en 1968", voir ci dessous). Il a fait remarquer qu'il ne devait pas être le seul gay à Pékin, et du coup, rien que dans l'équipe olympique australienne, deux autres ont confirmé...
A quoi ça sert, de se montrer comme ça ? Pas à provoquer, mais à passer de "out and proud" à "out and quiet" : c'est fatiguant, la fierté, et elle ne sert qu'à gagner la tranquillité, ce que prouve la photo de vacances post-olympique ci contre, et à être détendu, ce que prouve la première photo de médaille d'or au second degré ci contre également !
Et puis être Out and Quiet au lieu d'Out and Proud, c'est bon pour libérer les émotions, je ne me lasse pas de le voir rire et pleurer sans angoisse excessive. Et surtout, ne pas avoir honte de ses émotions, ne plus les réfréner comme les générations précédentes coincées par les clichés d'indentité sexuelle.



vendredi 24 octobre 2008

Le droit d'aimer qui on veut et le droit de ne pas être d'accord


C'est ce qui resterait de Mai 68, si on en croit le très très joli film "Nés en 1968". C'est certainement vrai, mais pour combien de temps ?
Mauvaises critiques à sa sortie en salles dans sa version courte.
Il y aurait eu des longueurs selon les critiques.
Je viens d'en voir sur mon beau grand écran les deux parties tv d'un coup.
Je n'ai pas vu une seule longueur.
Mais c'est certainement parce qu'il recoupe curieusement absolument toute ma vie et toutes les choses auxquelles j'ai cru et crois de plus en plus.
Avoir un père social-démocrate qui vous a eu sur le tard et peut vous raconter l'extrême droite contre le Front Populaire avec anecdotes vécues, et un frère de la génération de soixante huit qui cache son bulletin mao dans son bureau pliable, ça donne de la vision historique aux garçons des années 80.
Et puis ça commence par une des rares narrations justes de la vie des communautés agricoles des années 70 que j'ai eu la chance d'approcher étant donné mon âge, en Ardèche bien sûr.
M'envoyer là passer quelques semaines à douze ans me semble aujourd'hui avoir participé d'une démarche légèrement perverse de mes parents pour suivre la vie de mon frère, je leur en veux encore un peu bien que ce soit une démarche familiale d'enfants d'orphelin corse finalement assez salvatrice dans une relative hystérie.
Mais j'ai adoré échapper un peu au lycée et vendre des fromages sur le marché d'Aubenas en y allant à dos d'âne, ça a contribué à me pousser à rechercher en permanence la vérité crue.
Ca m'avait confirmé deux choses : que j'aime vraiment, vraiment, vraiment profondément la moyenne montagne, et que les libertaires sont eux aussi généralement homophobes (même si j'ai dormi dans le grenier avec la plus belle fille de la communauté - une vieille à mes yeux de l'époque. Le lit étant creux, on s'endormait accrochés aux bords, et on se réveillait l'un sur l'autre sans problème et en toute candeur).
Du coup, retour à Paris et amour de l'urbanité : la liberté n'est jamais là où se bat pour elle.
Je crois que si mon frère ne m'avait pas fait lire à cette époque "Le petit livre rouge de l'écolier et du lycéen", je n'aurais pas apppris à trouver autant de plaisir à vivre.
J'étais alors comme la plupart des petits pédés complètement englué dans une angoisse profonde en constatant que je n'étais pas tout à fait adapté à la société à laquelle on me préparait.
Et j'ai retenu de ce livre qui n'était pas mao mais bien éducatif deux choses : se concentrer sur ce qu'on aime et ne jamais avoir honte de son désir.
J'ai abandonné les sciences et couru dans la littérature, les langues, l'histoire et la géographie, mes résultats ont décollé, j'ai explosé ma libido, et j'ai été un peu moins souvent malade.
Et puis, surtout, cherché la vérité des sentiments. Ca me rend encore heureux aujourd'hui.
La seconde partie est aussi juste : la libération sexuelle, le sida, les trithérapies, le retour de la visibilité de l'extrême droite... Avec une simplicité que les autres films sur ces sujets, pourtant nombreux, n'ont jamais eu.
Je n'avais notamment jamais vu au cinéma, ni vu noté nulle part pour la mémoire, le désespoir qui est apparu avec les trithérapies parce tant étaient morts quelques mois avant leur arrivée. Et la culpabilité de vivre des séronégatifs : elle a été mille fois écrite, jamais montrée.
Le film se termine sur une phrase de Sarkozy révoltante et qui comporte sa part de vérité : il assimile l'existence de patrons voyoux profiteurs à l'héritage soixante-huitard. Si ce n'est pas un amalgame pervers, ça... quand on est l'auteur du paquet fiscal, des 170 %, et qu'on ressemble fortement à un patron voyou dans les médias ! Et pourtant le film a été tourné avant les derniers écroulements boursiers !
D'ailleurs, sur la fin, l'un des personnages se lance dans le microcrédit, et en vante la qualité révolutionnaire. Réponse à son utopie : "c'est le système financier international qu'il faudrait écrouler !"
Prémonitoire, non ? Sauf qu'il s'écroule toujours lui même et pompe tout le monde pour repartir.
Si on n'avait pas fait tant de prêts avec formules mathématiques imparables, on n'en serait pas là... le fait que les emprunteurs n'avaiEent pas de salaires avait il été prévu ?
Allez, j'arrête, je pourrais y passer la nuit.
Allez, Matthew (voir mon champion olympique ci dessous), continue, tu es dans le vrai et moi ça me donne l'envie de continuer à vivre pour voir des gens comme lui oser vivre.

mercredi 22 octobre 2008

Double calin après médaille d'or



On a morflé (moins que les précédents) mais ça valait le coup de leur préparer la voie d'une vie tranquille : encore un beau gosse d'aujourd'hui qui respire le courage et la sensibilité.
Je sais, c'est le deuxième en dix jours. Non, je n'ai pas réservé de billet pour aller chanter sous sa fenêtre à Sidney comme je l'aurais fait il y a encore peu : je ne brise pas les couples, moi, enfin, je suis trop vieux et j'ai déjà ce qu'il me faut. Voilà voilà.
Donc Matthew Mitcham, un australien de Brisbane qui vit à Sidney, a fait le plus beau plongeon de tous les jeux olympiques de toute l'histoire, et battu les chinois dans leur spécialité, d'où médaille d'or.
Mais en dehors que du fait que c'est un beau gosse de 23 ans sensible, ce qui me touche vraiment, c'est :
- qu'il s'est mis à pleurer tout de suite après son plongeon
- que deux ans avant il a fait une dépression et abandonné la natation
- qu'après avoir pris sa médaille d'or, il est allé glisser sa tête dans l'épaule de son copain (qui est encore plus grand que lui), ce qui n'a intéressé aucune télé du monde (ça c'est un progrès révolutionnaire)
- et que comme sa maman n'est pas riche, c'est le Centre Gay de Sidney qui a fait une collecte pour lui payer le voyage, il lui a fait un calin aussi (mais après Lachlan, le grand brun)
- et que comme son copain n'est pas riche et l'a supporté pendant deux ans de dépression, c'est la fondation Johnson qui a payé son voyage (comme aux autres conjoints de champions australiens)
- qu'il a repleuré à la conférence de presse
- qu'il a rerepleuré dans les bras de son copain après la conférence de presse, ce qui a fait repleurer sa maman puis son copain qui était resté solide jusque là (avec ce qu'il a dit endurer en deux ans)
- qu'il a dit que son seul regret avec les jeux olympiques c'était de ne pas avoir pu faire de shopping dans Pékin, et qu'en plus c'était du second degré pour fair rire les journalistes
- que ce qui lui a le plus plu, c'est que tout le monde vienne l'embrasser après le plongeon, là, c'était pas du second degré
- et que du coup il est allé avec Lachlan deux semaines en vacances en France... et en Toscane. Bon goût.
- en plus, il parle français, ce qui est un signe chez un australien.
Enfin, il a un peu de sous d'avance, parce qu'il fait maintenant les pubs d'Aussie Bum (Claudito, achète encore des slips roses et des maillots de bain qui lâchent au lavage, ça lui fait des revenus).
Bon, mais le plus important dans tout ça : c'est pas mignon, un champion olympique historique qui pleure ?
Ce qui m'étonne le plus, c'est que c'est exactement le scénario d'un petit film français d'il y a cinq ans, où le fils d'un syndicaliste faisait son coming out, puis une dépression, reprenait l'entraînement et devenait champion de natation puis tombait dans les bras du champion intello d'à côté.

dimanche 12 octobre 2008

Ravioli et haute civilisation baroque post-moderne identitaire



Voilà : comme tous les huit mois, j'ai passé une partie non négligeable du week end à faire des raviolis.
On porte dans le sang des siècles d'histoire, c'est comme ça.
Disons d'abord : une bonne heure et demi de conception et première étape de fabrication de la pâte. Souple, mais pas trop, pas trop collant mais bien frais, rechercher la couleur parfaite, tirer sur le jaune mais juste pour donner la sensation d'un velouté farineux d'une carnation quasi dermatique. La bonne dose de jaune d'oeuf, la bonne huile, la bonne farine,
Une bonne demi heure pour les conditions de repos et de préséchage.
Le bon saupoudrage de farine (avec le tamis adapté, je conseille les turinois).
Souple, ferme avec un rien de gélatineux solide : c'est impossible à décrire, mais les spécialistes comprendront.
Ensuite, bien deux heures pour les farces.
C'est là qu'on sent si on aime sa civilisation d'origine ou pas.
Si j'avais un grand père suédois, hop du fromage chaud et une couche de salami immonde, un coup de sureau et c'est fait pour la cuisine identitaire.
Ouf, enfin une chose à laquelle j'ai échappé.
Bref, au moment de la conception des farces, se développe le patrimoine historique personnel. Autant dire, j'aime le mien.
Ce week end, j'ai opté pour une aventure double :
- des raviolis fusion nouvelle cuisine,
- des raviolis haute tradition.
On rentre là dans un phénomène complexe qui peut en un instant ravager l'ensemble de la cuisine.
Il y a le coin des herbes : persil frais, sauge, myrte en ce qui me concerne, au minimum. Ail pour le tout. Intense réflexion sur les dosages et test.
Ensuite, on passe aux choses consistantes.
Quoiqu'il arrive, il faut du pain trempé et essoré (l'essorage est fondamental pour les consistances finales).
Donc, on se résume : le coin de la pâte est couvert de farine, de torchons divers et de boules à des états divers selon les besoins finaux. Le coin des herbes n'est pas mal non plus.
Voici maintenant la partie hachages, moulinages, dosages et pétrissages : mélange de viandes, jambons et lards avec tout le reste.
La partie "fusion" a nécesité ce week end un atelier supplémentaire : saumon fumé, crème fraîches, recherche d'une consistance qui se tienne tout en gardant le fluide du frais.
Une bonne heure et demi pour la farce.
Une partie reste fraîche, l'autre doit être précuite, d'où diverses cuissons, poêlage pour les viandes, bains marie pour 10 grammes de certains autres éléments.
Et s'ensuite le mélange du cuit et du cru.
Enfin, dans une dernière partie de l'espace de travail, la presse à pâte et les formes.
Compter une bonne demi heure d'équilibrisme : une main sur la manivelle, une autre pour nourrir la machine, la troisième pour recevoir et allonger les abaisses (le geste est fondamental, le bon étirage est lui aussi une condition sine qua non de la réussite finale).
Dernières étapes : moulage. Un coup ça colle, un coup ça se détache trop. Poser les abaisses sur les formes, elles doivent être absolument régulières, sinon il y a des trous et tout s'écroule.
Puis tassage, et découpage. Très dangeureux et aléatoire.
Fondamental également.
Vous remarquerez qu'environ déjà cinq heures sont passées.
Mais apparaît le premier plaisir d'apparition de l'oeuvre.
Les raviolis sont la persistance éternelle de l'esprit baroque latin dans la cuisine.
Tout y est complexe, parfait, charnel, et surtout, tout repose sur l'idée de moulure décorative.
Et on sent le risque jusqu'à la fin.
La moindre erreur et à la première minute de cuisson tout part en vrille en bouillie sale au fond de la casserole bouillante, et rien n'est rattrapable, tout est à jeter.
Ce week-end, j'ai réussi mes deux types de raviolis : au bout d'une minute et demi penché dans les fumées et vapeurs, ils sont remontés des entrailles de l'enfer avec la consistance la plus parfaite sous le couteau, les goûts frais et cuits parfaitement équilibrés.
Par contre je suis toujours aussi nul en ce qui concerne les moulures.
C'est que je ne dois pas être aussi baroque qu'on le dit.

samedi 11 octobre 2008

Nicolas O, pure AOC Ollioules


La reprise de "Cherchez le garçon" de la playlist (si elle marche aujourd'hui), c'est déjà au moins la cinquième (si je les connais toutes).
Quand je pense que la version originale par Daniel Darc dans Taxi Girl ne s'était absolument pas vendue...
Mais là n'est pas le sujet. Je préfère donc nettement celle-ci, de Nicolas O, qui respecte absolument l'esprit techno du départ.
En ces temps virtuellement désespérés, voici une raison d'espérer : Nicolas O (alias Nicolas Vitiello, quand il prend le nom de sa mère, ou Crapanzano quand il garde celui de son père), est une belle plante, certes, mais en plus c'est un chanteur à minettes qui tourne au comédien intello actuellement avec une prédilection pour le théâtre identitaire branché (avec le soutien d'un certain Jean-Claude Camus, tiens tiens).
Et il est né... en février 1982 à Ollioules. Il n'était donc même pas né quand Daniel Darc a créé "Cherchez le garçon" !
Ah, encore du pur AOC... mais, narcissisme excessif à peine mis à part, le petit modèle latino, c'est quand même bien... Sensible, volontaire, sexy, intelligent et original.
En plus Nicolas Vitiello a réalisé des petits clips pour soutenir les disques de Michal, et celui-ci montre combien les petits modèles latinos ont le sens de la famille, et leur famille le sens du fun et du soutien quoiqu'il arrive, même avec les copains polonais (aio !).

Enfin, je passerai sur le fait que le beaux gosses d'aujourd'hui sont sensibles et courageux, et ont oublié d'être idiots ou vaniteux (je passerai également sur le fait qu'il assume joyeusement d'avoir été "le petit crapi" au collège George Sand du Pont du Las).

Max Weber écrivait en 1905

Après l'échec d'un appel au « sens du profit » par le moyen de hauts salaires, il ne restait plus qu'a recourir au procédé inverse : par un abaissement du salaire contraindre l'ouvrier à un travail accru afin de conserver le même gain.
Pour l'observateur superficiel, bas salaires et hauts profits semblent être en corrélation, tout ce qui est déboursé comme salaire paraissant correspondre à une réduction du profit.
Sans désemparer, le capitalisme a suivi cette voie depuis le début.
Des siècles durant, ce fut un article de foi que les bas salaires sont productifs, en ce sens qu'ils augmentent le produit du travail.
Selon un Pieter de la Court - dont l'esprit est sur ce point, tout à fait semblable à celui du vieux calvinisme - le peuple ne travaille-t-il pas que parce qu'il est pauvre, et aussi longtemps qu'il le reste ?


C'est vraiment le bon moment pour lire Max Weber, "L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme" (1904-1905)

jeudi 2 octobre 2008

1984, 2001 : mais qu'en pensent les gens qui ont eu 18 ans après ?


Pour ma génération (et celles d'avant), la représentation du futur était une obligation utopiste.
Metropolis, pour mon père (et moi à la première restauration du film), 1984 d'Orwell, 2001 Odyssée de l'espace...
Mais comment ceux pour qui ces dates appartiennent au passé vivent ces représentations passées du futur d'hier ?