samedi 8 mai 2010

Ah, le bon temps du "Rien à cirer" d'Edith Cresson

C'était le bon temps !
"Moi la bourse, j'en n'ai rien à cirer", avait dit la première Première Ministre, Edith Cresson (juste avant, elle avait comparé les anglais à des "fourmis homosexuelles"), impayable au vrai sens du terme, quand même. Pauvre Sarko : pour le dixième de ça, il se fait étriller sans ménagements. Je passerai sur une analyse sémantique par trop rapide : dans le language populaire, est ce que c'est bien la bourse qu'on a l'habitude de cirer ?
Tout blah blah mis à part, cette lumineuse sortie rappelait la place de l'argent et du jeu : en dessous du politique, pas au dessus. Parce qu'on ne joue pas la vie des autres au Casino : loin de moi l'idée d'interdire de jouer à tous les jeux les plus débiles et improbables qu'on veut, mais personne n'est obligé d'obliger les autres à participer à des looser's games.
Reprenons les derniers moments de l'histoire de l'argent sur notre jolie planète unipolaire (et bientôt tout juste polaire) :
- si on prêtait à des gens qui n'ont pas de salaires en augmentant les remboursements quand ils n'ont pas d'argent ? (Etats Unis, Présidence Bush)
- si on croyait aux modèles mathématiques abstraits et sophistiqués pour obliger les entreprises à nous donner des profits de 20% qu'on dépenserait à des choses improductives pour s'éclater ? (Université Paris Dauphine, Présidence Chirac)
- si on créait en France le même système de prêt qu'aux Etats Unis ? Ooooooups, finalement non, ça a l'air de sentir le roussi, pardon pardon je n'ai rien dit (France, Présidence Sarkozy),
- si on donnait tous les sous que les citoyens n'ont pas pour renflouer les banques qui se sont plantées avec leurs modèles mathématiques sans aucune contrepartie et en ne changeant rien ? (Europe, pas encore de Présidence crédible)
- maintenant que les Etats se sont surendettés pour valider nos conneries, si on leur disait qu'on n'a plus confiance en eux tellement ils dépensent, et on ferait trimer les imbéciles qui vivent là où on va en vacances, parce que si on y va en vacances pour ne rien foutre et salir les plages, c'est donc qu'ils ne foutent rien et qu'ils sont sales ? (Quelques grands immeubles de comptables astucieux à Francfort, Londres, Manhattan et dans le sud du New Jersey) ?

On a beaucoup comparé la Grèce et la Corse ces derniers jours, il n'y a pas de hasard.

Edith Cresson, elle était pas mal, quand même (d'ailleurs je l'ai eue comme prof d'éco à Paris XIII, elle venait prendre le café avec nous dans les bars de banlieue bétonnée qui n'était alors que tristes, pas encore des quartiers à risques, avec les boucles d'oreilles les plus dingues que j'aie jamais vues : un lustre vénitien, à côté c'est rien).

samedi 1 mai 2010

Le travail, un truc de vieux

C'est réussi, la revalorisation de la "valeur travail". Non seulement il n'a jamais eu aussi peu de valeur, mais tout le monde en est dégoûté (sauf pour y mettre les autres, en les laissant absolument abandonnés bien sûr).

Mais plus grave, au moment où tout ce que le politique trouve c'est de faire travailller les vieux en laissant chômer les jeunes, c'est qu'il ne soit plus du tout à la mode auprès des jeunes, justement, d'autant plus que les vieux en sont tout à fait fatigués.

Pourtant, ce serait normal de laisser la jeunesse s'enthousiamer et changer le monde, nous bousculer... ça n'arrivera pas, le travail est moins à la mode que les lunettes de soleil et les piercing (auxquels on s'intéresse quand on n'a plus rien d'autre à faire. D'ailleurs en général on les achète aux chinois).

Joignez vous à la manif : les-bobos-à-paris-rendez-nous-nos-poissonnières ! Ca y est on tombe dans la pipolisation !

Ainsi donc enfin Charles Berling, qui est né à Toulon, va faire quelque chose à Toulon, et nous aurons dans un peu plus d'un an un grand théâtre en plein centre, avec un budget respectable. En soi c'est bien.

Evidemment, c'est encore un peu de mon Toulon qui fuit, qu'est ce que je regrette cette ville populaire, chaleureuse et mal foutue qui n'en finit plus de vouloir être normale ces dernières années. Je ne sais pas, si j'y arrivais aujourd'hui, si je l'aimerais autant que quand j'ai débarqué il y a trente ans.

Et puis face à la réaction de X ("je vais aller manifester sur la Place de la République avec Lulu - elle est prête et elle a fait sa banderolle - rendez nous nos poissonnières) tout un tas de souvenirs me remontent à l'esprit. C'est exactement ce que je ressens.

On adorait, avec Simone Komatis, rigoler en nous souvenant de la réaction du public toulonnais en 1968 face au Grand Magic Circus, qui faisait scandale en montrant ses fesses, acte significatif à l'époque : "ah ben dis donc, c'est des belles fesses, ça". On ne fait pas plus raisonnable comme réaction et comme sagesse face à une agit-prop quelque peu dérisoire (même si je garde un souvenir ébloui du Grand Magic qui n'a pas grand choseà voir avec les fesses !). Les meilleures tragédiennes de Toulon sont nos belles vendeuses du Cours Lafayette, en tout cas ce sont celles que je préfère...

Au lieu de se féliciter d'avoir enfin ce que toutes les grandes villes françaises ont, nous avons eu droit à une vraie polémique people : mais comment ? Christian Tamet n'a même pas été prévenu ? Est ce que ce ne serait pas Carla qui aurait fait nommer un de ses ex ? Passionnant, non... personne n'a commenté les qualités des frères Berling (puisque qu'ils prennent ensemble la direction : étrange, cette façon de confier un théâtre à une famille : c'est déjà un drame antique en soi), personne n'a discuté une quelconque ligne artistique, une programmation, un style... alors à quoi bon ?

Hubert Falco et les frères Berling l'ont tout de suite fait savoir : leur façon d'annoncer tout ça a été un peu cavalière, pas très respectueuse pour Châteauvallon, sans qui aucune diffusion culturelle d'envergure n'aurait existé depuis 40 ans.

Mais personne non plus n'a relevé le débat : n'est il pas normal que dès lors qu'une faille dans le système culturel est enfin comblé, chaque autre institution cherche sa propre originalité ? Car il y en a, maintenant, des institutions culturelles, même si elles sont moins développés qu'ailleurs : un centre d'art, un musée d'art, une maison de la photographie, un centre culturel pour la jeunesse, le Festival du Gaou... Châteauvallon n'est plus seul dans un désert.

Alors quand même, bienvenue aux frères Berling, et intéressons nous à ce qu'ils vont faire au lieu de verser dans les greuh greuh.