vendredi 16 mai 2008

Dix heures en apesanteur


Une journée comme une apparition divine. Je ne connaissais pas les cinque terre, j'avais un peu peur que ce soit dévoyé (c'est le sentier de randonnée le plus populaire d'Italie, qui relie les cinq villages desservis par route depuis 1986 : avant, train et bateau suffisaient).
Départ de la Spezia à 10 heures, arrivée à Monterosso (au fond sur la première photo, ce n'est pas rosso du tout) un quart d'heure après en train.
Joli, Monterosso, mais bon, un peu trop Alpes Maritimes à mon goût, le charme en plus.
Au bout d'une heure et demi de montée et descente vertigineuse au milieu des vignes et des jardins où dévalent torrents et ruisseaux, arrivée à Vernazza. Sublime bien que ce soit une sorte de joyau touristique. Peut être finirai je là, dan sun petit deux pièces bruyant avec une petite terrasse pour regarder les allemands randonneurs manger des glaces (et les tempêtes, l'hiver).

Encore une heure et demi dans les vignes, montées, descentes, passage dans un hameau gentiment désolé avec un bar bab endormi.
Pour vendanger, tout un système de rails à crémaillère circule en cercles d'une restanque à l'autre. Y circule une sorte de petit train qu'on voit sur la petite photo.
Et on arrive à Corniglia.
Là, c'est mon village préféré des cinque terre.
Un gros bourg curieusement élégant, apparemment pauvre, mauvais caractère, rural, mais alors vraiment rural (les habitants refusent toute construction d'hôtel et organisent des procès qu'ils gagnent à tout bout de champ).
C'est le premier sur la photo ci-dessous.
Là, ça fait trois heures qu'on marche entre ciel et terre.



Arrêt sur de petites places cachées dans Corniglia, serveuse marocaine et francophone, ambiances tout à fait urbaines et éternelles.
Vient alors une heure à peu près à plat le long de la pente jusqu'au quatrième village, Manarola.
Manarola est au fond, derrière Corniglia.
Le chemin n'est plus beau, mais nettement moins fatiguant, et la végétation dégouline quand même de partout. On croise des installations pour chats (organisées par le Parco Nazionale. Avec un certain humour : petites tentes à leur taille, panneaux : donnez à manger à ces pauvres chats sans toits et sans amour... on a croisé le cousin italien de Abar : à vue de nez il doit être de Corniglia, et à mon avis, l'amour et les toits, il s'en tape tant que la croquette va)



A Manarola, on sent la grande ville pas loin : tout prend une grande taille, les restos sont sophistiqués, les gens habillés. Après Manarola, vingt minutes d'une promenade presque métropolitaine, absolument magnifique. Tout ça est stupéfiant, il n'y a qu'à voir ma tête.

A Manarola, tout est propre, il y a de jolies pelouses herbues donnant sur l'infini marin, et les chats ont une autre vie que le cousin d'Abar. Ils ont des tables juste pour eux sur leurs terrasses privées.

La Via dell'Amore est donc très urbaine et démarre juste après Manarola. L'impression de suspension dans une autre monde est complète. La vie urbaine italienne reprend ses droits : vieilles dames polies, couples avec poussettes, non-chalance et conversations faciles.
Comme c'est l'heure de l'amour et de l'apéro, il y a la terrasse la plus suspendue du monde pour boire deux verres de Prosecco (enfin, un chacun) pour dire des choses éternelles baignées du changement de lumière de la mer dans la progression de l'après midi vers la soirée.


Après vingt minutes de passeggiata urbaine dans la roche, on arrive à Riomaggiore. Dernier village (ou premier en arrivant de la Spezia, il vaut mieux commencer par l'autre bout). Une grande avenue qui glisse d'un coup dans la mer, avec des passages en tunnel.
Là, pas la peine d'aller dans le resto gastronomique que recommandent les guides.
Nous avons mangé sur la toute petite terrasse que l'on aperçoit suspendue au dessus de la mer. Ce n'est pas un restaurant. Mais il y a du risotto aux fruits de mer (et comme le dit clairement la serveuse, è dalla Findus). Musique parfaite et pas trop fort (jamais je n'avais autant apprécié Fabrizio de Andrè), tous seuls avec vue sur toutes les montagnes marines des cinq terres, une bouteille de blanc de l'endroit, on est rentré en train en rigolant, dix minutes plus tard, la Spezia, et le My one Hotel très agréable sur la colline avec un très très très bon rapport qualité prix (65 % de réduction en réservant sur Venere).


Un passage au paradis, donc. Mais le mieux c'est peut-être la Spezia. La ville d'Italie dont tout le monde dit qu'elle est atroce. Tant mieux, pas de touristes. Elle est pleine de cicatrices grises, un arsenal d'un côté, un horrible port de commerce de l'autre. Mais, entre les deux, une parfaite ville italienne, et même italianissime. Tout le monde dans la rue en famille, les gnomes, les bellâtres, et les places avec l'apéro du soir, les enfants qui crient sur leurs vélos en plastique, les parents qui hurlent qu'il faut rester silencieux et se taire.
Des bars avec deux cent jeunes dans la rue babillant le verre à la main sous des affiches "ne dérangez surtout pas le voisinage".
En plus tout ça ne se voit pas du premier coup d'oeil, il faut laisser la ville venir à soi, constater qu'il y règne une gentillesse un peu lourde.
Et puis, qui aurait osé faire ce concentré d'architecture historique contradictoire, élégante et joyeuse ?

2 commentaires:

FunPv a dit…

Nous sommes passés par les cinque terre et nous avons aimé mais n'avons pas fait cette ballade qui a l'air bien sympa.
Peut être essayerons nous un jour.
Mais ça ne me surprend pas qu'après avoir découvert des paysages si sublimes tu conclues sur ton intérêt pour la Spezzia....

jean paul Mathieu a dit…

je veux faire cette ballade peut etre la faire et la refaire tous ensemble ... quand on aime on compte pas ...